Fukushima, un mot qui résonne encore dans nos esprits.
Le 11 mars 2011, un tremblement de terre de magnitude 9 a eu
lieu à l’est de la côte Pacifique du Japon, suivi d’un tsunami ravageur et de l’endommagement
d’une centrale nucléaire.
Un séisme qui a également fait se déplacer l’axe de la
rotation de la terre de dix centimètres… « alors imaginez ce qui s’est
passé avec ces maisons » qui étaient sur la côte à proximité de l’épicentre.
Michael Ferrier enseigne la littérature à Tokyo et a publié
plusieurs livres sur le Japon. Il était dans la capitale lorsque le séisme a eu
lieu et raconte, avant de partir, vers le nord, voir par lui-même ce qu’est
devenu son pays d’accueil.
Le Japon contient 20% des secousses les plus violentes au
monde apprend-t-on dans le récit de Michael Ferrier. Si l’on n’est pas
japonais, il est fort probable que l’on n’a jamais connu de séisme violent. Pourtant,
à la lecture des mots de M. Ferrier, on pourrait presque croire qu’on y est.
Il dit d’abord les sensations : les bruits, les fleurs
qui embaument malgré les secousses, la terre qui ondule sous soi. Il dit avec
sa prose ce qui ne devrait pas pouvoir être traduit en mots, et l’on a la chair
de poule, on continue sa lecture fasciné tout en se raccrochant à ce qui nous
rattache à la terre ferme, comme si sous l’effet des mots, la terre pouvait
aussi se mettre à trembler à des milliers de kilomètres de là, plus de deux ans
plus tard.
"Tout en la guettant du coin de l'oeil, je prête l'oreille à cette rumeur qui monte, qui s'agrandit. C'est un bruit de mandibules, ténu et formidable, un langage de termites. Un idiome étrange, grêle et rude, fait de crissements de graviers et de petits coups de bec, un dialecte d'insecte."
Il raconte le Japon dans les jours qui ont suivi la
catastrophe avec l’œil neuf d’un étranger qui pourtant vit dans ce pays et est embarqué dans cet
événement au même titre que tous les habitants de l’île.
Il part vers le nord de l’île, découvrir la réalité
abasourdissante. Il écoute ce que les survivants ont à dire.
« Ils me racontent, ils me racontent encore, parfois avec des larmes au bord des yeux, avec des tremblements dans les mains. Il faut que je les écoute, il ne faut pas que je flanche, ils ne flanchent pas, eux. Ils vont jusqu'au bout de leur parole, ils me le disent, dans leur désordre même, dans la fureur qui s'est emparée du récit."
Odaka, village fantôme situé à une douzaine de km de Fukushima
Photograph by James Whitlow Delano/Redux (source ici)
Dernière étape du voyage, Fukushima. La radio égrène les taux de radioactivité comme on le ferait ailleurs avec la météo du jour. Juste avant la zone interdite, les agriculteurs de la région, autrefois réputée pour ses légumes, son saké et ses boeufs, racontent aussi. Les autorités et Tepco qui disaient qu'il n'y aurait jamais de catastrophe, les bêtes confinées au-delà de la limite qu'on entend agoniser à des kilomètres. Et puis l'atmosphère irréelle quand on franchit cette fameuse limite. L'absence de bruit, les rares voitures qui semblent fuir.
"Il est difficile de décrire ce que l'on ressent quand on arrive dans un de ces villages fantômes. D'abord, le silence est colossal, un silence profond et qui semble sans fin. J'ai l'impression d'être devenu sourd. Le cri des corbeaux, le ronflement des moteurs, l'aboiement des chiens, c'est comme s'ils n'avaient jamais existé. Le vent même a disparu."
Ces villages fantômes ont été évacués, oubliés. Et aussi incroyable que celui puisse paraitre, avec eux a été oubliée toute mesure de prudence.
Certes, une zone au delà de laquelle il est interdit de rester a été créée. Certes, les 34 000 enfants de Fukushima sont équipés de dosimètres permettant de calculer le taux de radioactivité.
Mais ces demi-mesures semblent superflues et inefficaces, alors même que le discours ambiant est "tout va bien". Portez un chapeau, lavez-vous les mains et vous éviterez toute contamination, dit-on dans la préfecture de Chiba.
Pendant que tout le monde préfère oublier la réalité, les particules nucléaires, silencieuses, continuent de s'échapper de la centrale de Fukushima.
A travers son ressenti personnel, Michael Ferrier nous transmet un récit implacable sur la catastrophe de Fukushima. Ses mots frappent, bouleversent, prennent à la gorge et réussissent à raconter l'irracontable.
Alors que les traces de la tragédie sont encore bien visibles dans la région de Sendai, le Japon pense pourtant déjà à reconstruire de nouvelles centrales. Un livre nécessaire, publié un an après les événements, qui nous rappelle pourquoi il est urgent de ne pas oublier Fukushima, à l'heure où il est bien plus facile d'avoir la mémoire courte.
"Contrairement à ce qu'on a pu lire ou entendre ici ou là, Fukushima n'est pas une apocalypse. Ce n'est pas un accident total (encore que celui-ci soit toujours possible). Mais d'une certaine manière, le pire a déjà eu lieu, il est là, tout autour de nous.
C'est une catastrophe en gargouillis, non en apothéose. Une sorte de dégringolade quotidienne, systématique. Ce n'est pas une extermination violente, c'est un état létal - et désormais de plus en plus létal. Par petites doses, une sorte d'homéopathie à l'envers, une forme dévitalisée de la vie."
J'ai reçu un exemplaire supplémentaire de ce livre, que je vous propose donc de gagner.
Pour cela, je tirerai au sort une personne parmi ceux qui m'auront donné la réponse à la question suivante (petit clin d'oeil au mois anglais) :
A quoi fait référence la couverture de l'édition poche Folio de ce livre ? (très dur ;) )
Réponse par mail (touloulou.books [@] gmail.com) avant le 24 juin de la part de personnes déjà passées par ici ou croisées ailleurs (forums, facebook, twitter que sais-je...)
Merci à Livraddict et aux éditions Folio