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mardi 18 juin 2013

Fukushima, récit d'un désastre, de Michael Ferrier


Fukushima, un mot qui résonne encore dans nos esprits.
Le 11 mars 2011, un tremblement de terre de magnitude 9 a eu lieu à l’est de la côte Pacifique du Japon, suivi d’un tsunami ravageur et de l’endommagement d’une centrale nucléaire.

Un séisme qui a également fait se déplacer l’axe de la rotation de la terre de dix centimètres… « alors imaginez ce qui s’est passé avec ces maisons » qui étaient sur la côte à proximité de l’épicentre.

Michael Ferrier enseigne la littérature à Tokyo et a publié plusieurs livres sur le Japon. Il était dans la capitale lorsque le séisme a eu lieu et raconte, avant de partir, vers le nord, voir par lui-même ce qu’est devenu son pays d’accueil.

Le Japon contient 20% des secousses les plus violentes au monde apprend-t-on dans le récit de Michael Ferrier. Si l’on n’est pas japonais, il est fort probable que l’on n’a jamais connu de séisme violent. Pourtant, à la lecture des mots de M. Ferrier, on pourrait presque croire qu’on y est.
Il dit d’abord les sensations : les bruits, les fleurs qui embaument malgré les secousses, la terre qui ondule sous soi. Il dit avec sa prose ce qui ne devrait pas pouvoir être traduit en mots, et l’on a la chair de poule, on continue sa lecture fasciné tout en se raccrochant à ce qui nous rattache à la terre ferme, comme si sous l’effet des mots, la terre pouvait aussi se mettre à trembler à des milliers de kilomètres de là, plus de deux ans plus tard.

"Tout en la guettant du coin de l'oeil, je prête l'oreille à cette rumeur qui monte, qui s'agrandit. C'est un bruit de mandibules, ténu et formidable, un langage de termites. Un idiome étrange, grêle et rude, fait de crissements de graviers et de petits coups de bec, un dialecte d'insecte."
Il raconte le Japon dans les jours qui ont suivi la catastrophe avec l’œil neuf d’un étranger qui pourtant vit dans ce pays et est embarqué dans cet événement au même titre que tous les habitants de l’île.

Il part vers le nord de l’île, découvrir la réalité abasourdissante. Il écoute ce que les survivants ont à dire.

« Ils me racontent, ils me racontent encore, parfois avec des larmes au bord des yeux, avec des tremblements dans les mains. Il faut que je les écoute, il ne faut pas que je flanche, ils ne flanchent pas, eux. Ils vont jusqu'au bout de leur parole, ils me le disent, dans leur désordre même, dans la fureur qui s'est emparée du récit."

Odaka, village fantôme situé à une douzaine de km de Fukushima
Photograph by James Whitlow Delano/Redux (source ici)

Dernière étape du voyage, Fukushima. La radio égrène les taux de radioactivité comme on le ferait ailleurs avec la météo du jour. Juste avant la zone interdite, les agriculteurs de la région, autrefois réputée pour ses légumes, son saké et ses boeufs, racontent aussi. Les autorités et Tepco qui disaient qu'il n'y aurait jamais de catastrophe, les bêtes confinées au-delà de la limite qu'on entend agoniser à des kilomètres. Et puis l'atmosphère irréelle quand on franchit cette fameuse limite. L'absence de bruit, les rares voitures qui semblent fuir. 

"Il est difficile de décrire ce que l'on ressent quand on arrive dans un de ces villages fantômes. D'abord, le silence est colossal, un silence profond et qui semble sans fin. J'ai l'impression d'être devenu sourd. Le cri des corbeaux, le ronflement des moteurs, l'aboiement des chiens, c'est comme s'ils n'avaient jamais existé. Le vent même a disparu."

Ces villages fantômes ont été évacués, oubliés. Et aussi incroyable que celui puisse paraitre, avec eux a été oubliée toute mesure de prudence.
Certes, une zone au delà de laquelle il est interdit de rester a été créée. Certes, les 34 000 enfants de Fukushima sont équipés de dosimètres permettant de calculer le taux de radioactivité. 
Mais ces demi-mesures semblent superflues et inefficaces, alors même que le discours ambiant est "tout va bien". Portez un chapeau, lavez-vous les mains et vous éviterez toute contamination, dit-on dans la préfecture de Chiba.
Pendant que tout le monde préfère oublier la réalité, les particules nucléaires, silencieuses, continuent de s'échapper de la centrale de Fukushima. 


A travers son ressenti personnel, Michael Ferrier nous transmet un récit implacable sur la catastrophe de Fukushima. Ses mots frappent, bouleversent, prennent à la gorge et réussissent à raconter l'irracontable. 
Alors que les traces de la tragédie sont encore bien visibles dans la région de Sendai, le Japon pense pourtant déjà à reconstruire de nouvelles centrales.  Un livre nécessaire, publié un an après les événements, qui nous rappelle pourquoi il est urgent de ne pas oublier Fukushima, à l'heure où il est bien plus facile d'avoir la mémoire courte.

"Contrairement à ce qu'on a pu lire ou entendre ici ou là, Fukushima n'est pas une apocalypse. Ce n'est pas un accident total (encore que celui-ci soit toujours possible). Mais d'une certaine manière, le pire a déjà eu lieu, il est là, tout autour de nous. 
C'est une catastrophe en gargouillis, non en apothéose. Une sorte de dégringolade quotidienne, systématique. Ce n'est pas une extermination violente, c'est un état létal - et désormais de plus en plus létal. Par petites doses, une sorte d'homéopathie à l'envers, une forme dévitalisée de la vie." 


J'ai reçu un exemplaire supplémentaire de ce livre, que je vous propose donc de gagner.
Pour cela, je tirerai au sort une personne parmi ceux qui m'auront donné la réponse à la question suivante (petit clin d'oeil au mois anglais) :

A quoi fait référence la couverture de l'édition poche Folio de ce livre ? (très dur ;) )

Réponse par mail (touloulou.books [@] gmail.com) avant le 24 juin de la part de personnes déjà passées par ici ou croisées ailleurs (forums, facebook, twitter que sais-je...)

Merci à Livraddict et aux éditions Folio

vendredi 14 octobre 2011

Fiasco ! Des écrivains en scène, Collectif


Les écrivains auraient bien des choses à nous dire sur les à-côtés de leurs métiers : de la publication du premier manuscrit à la (rançon de) la gloire, ils sont exposés à toutes les situations inimaginables. Or, leur travail consistant à raconter des histoires, pourquoi ne pas nous faire partager ces anecdotes ?

C’est toute l’idée du recueil Hontes. Confessions impudiques mises en scène par les auteurs,  dont sont extraits les morceaux publiés dans Fiasco !, publié dans la collection des Folio à 2€. 

Un seul mot pour donner mon avis sur ce livre : je me suis régalée ! Très petit, je l’ai glissé dans mon sac pour mes trajets de bus quotidiens. Le format (des récits de quelques pages seulement) se prêtait parfaitement à ces moments de lecture grappillés de ci, de là. A tel point que j’aurais aimé pouvoir tenir plus longtemps sur le recueil, et que je l’ai fini bien trop rapidement…
Les anecdotes sur la honte sont les plus universelles : chacun d’entre nous en a de nombreuses à raconter. Mais lorsque ce sont des écrivains qui le font, c’est encore plus drôle et plaisant. Tous les récits m’ont accrochée dès le début et m’ont donné envie de découvrir les bibliographies des auteurs du livre, en particulier John Banville dont j’avais déjà entendu parler  sans être particulièrement tentée, jusqu’à ce que je lise son témoignage, un bonheur pour les yeux et les oreilles :

 « Je suis arrivé à Miami par un de ces après-midi que je croyais réservés aux pays arabes : tout n’était que blanc burnous et camaïeux infinis d’ocre doux et de bleu pâle. Vue de la route de l’aéroport, la ville miroitait sous une brume pourpre où tremblotaient ses tours en verre et argent (…) Posé à la fenêtre, je contemplais cette lumineuse scène paradisiaque en m’imaginant que j’avais atterri sur une autre planète, infiniment plus agréable que celle, à l’autre bout de la galaxie, sur laquelle le monde tel que je le connais avait été maladroitement modelé. »

Les situations cocasses rivalisent les unes avec les autres : entre Jonathan Coe obligé de ramper pour sortir en avance d’une émission télé sans passer dans le champ de la caméra, Chuck Palahniuk qui s’entend dire à une séance de dédicaces « je ne vais quand même pas faire la queue des heures pour faire signer mes bouquins par ce gros naze ! », Alan Warner obligé de signer un livre qui n’est pas de lui mais d’un homonyme à des voisins enthousiastes ou encore Thomas Lynch qui croit reconnaitre un fan à un festival de poésie alors que ce n’est autre que l’acteur Ralph Fiennes qui se tient devant lui, le temps passe bien trop vite et déjà ce petit recueil est fini.

Il ne me reste plus qu’à lire la version complète dont il est extrait !

Merci beaucoup aux éditions Folio et à Livraddict pour cette découverte. 
Première lecture pour le challenge de George Le nez dans les livres.

mercredi 8 décembre 2010

Les messages cachés d'Harry Potter

Présentation de l'éditeur :
Ces " messages cachés " nous entraînent au cœur de l'univers magique du jeune Harry Potter, celui qui fascine encore et toujours des millions de lecteurs puis de spectateurs partout dans le monde. Comme un photographe passionné change d'objectif, de cadrage, d'éclairage pour mieux révéler ce qu'il aime, l'auteur braque ici son regard curieux sur les aventures du magicien rebelle... Outre la biographie de J.K. Rowling, l'ouvrage aborde et développe tous les thèmes de la saga et en dévoile les mystères. Derrière les créatures féeriques, les elfes, les trolls, les centaures, les sorts et les magiciens se " cache " une œuvre d'une grande portée politique, révoltée et émancipatrice, où religion, sexualité, racisme et différences sociales sont subtilement évoqués. Rien n'échappe à l'analyse minutieuse de l'auteur qui fait de ce livre l'ouvrage le plus complet sur le sujet. Tous les fans trouveront dans ces pages tout ce qu'ils ont toujours voulu savoir sur Harry, Ron, Hermione, Hagrid, Dumbledore, Severus et les autres ! 

Mon avis 
En tant que fan d’Harry Potter, je suis la cible privilégiée des livres comme les Messages cachés d’Harry Potter. J’ai donc lu avec plus ou moins d’intérêt les différentes parties du livre.
La bio de JK Rowling est intéressante : je connaissais certains éléments, mais j’en ai découvert bien d’autres. Les diverses influences littéraires de l’auteur, autant en littérature jeunesse qu’adulte, sont également passionnantes, bien que cette partie ne soit souvent pas assez développée. Hammadi consacre ensuite plusieurs chapitres à des réflexions autour de certains thèmes centraux dans la série du petit sorcier : l’éloge de la différence et de l’égalité, la lutte entre le bien et le mal, entre la facilité et le combat, la vision de l’amitié, de l’amour ou de la mort. Ca avait l’air passionnant en perspective ; et c’est là que le bât blesse, car la réalité ne suit pas.
 L’argumentation est très brouillone, et certains chapitres se répètent. Certains arguments sont balancés comme ça, sans développement, parfois la thèse n’est même annoncée qu’à la fin du chapitre ! A un moment, l’auteur, en évoquant la banalité du mal contre laquelle Harry lutte, indique en note de bas de page : « Lire à ce sujet L’origine du totalitarisme d’Hannah Arendt ». Il aurait certainement été plus intéressant d’expliquer la thèse d’Arendt et en quoi elle pouvait aider à mieux comprendre l’œuvre de Rowling car je doute que beaucoup de gens lisant Les messages cachés d’Harry Potter vont du tac au tac se jeter sur le livre en question (ça n’a en tout cas pas été mon cas).
Des détails font aussi que le livre ne fait pas vraiment professionnel. L’auteur ne manque pas de déclarations dithyrambiques concernant JK Rowling. Il ne cache pas son côté fan et son adoration pour elle, ce qui choque un peu dans un tel livre. Il va même jusqu’à faire un commentaire que je trouve déplacé sur un professeur qu’a eu Rowling :
« Son institutrice, Mrs Sylvia Morgan, place les bons élèves à gauche et les mauvais à droite (Jo étant placée par cette folle dans la « rangée stupide »). »
L’auteur résume également les livres et films sortis au moment de sa publication, et en fait une véritable critique. J’ai trouvé cela également déplacé, vu que ce n’était pas l’objectif du livre (du moins pas celui qui était présenté sur la quatrième de couverture). Un recensement des différents personnages m’a également légèrement ennuyée. Pas besoin de lire des essais sur le thème pour apprendre les éléments indiqués ; lire les livres de Rowling suffit amplement.
Enfin, plusieurs fautes d’orthographe donnent l’impression que le livre a à peine été relu avant d’être publié. Peut-être s’agissait-il de le publier le plus vite possible, pour surfer sur la vague après la sortie du dernier livre ? (Le livre a été publié en 2008)
Le livre se termine cependant sur une note plus positive : toute une série d’anecdotes sur les livres et leur création, très plaisante à lire. J’en connaissais certaines (elles ont notamment été racontées sur le site officiel de Rowling), mais c’est exactement le genre d’éléments qui comblent les fans.
Quelques exemples :
·         Elle a imaginé Hagrid comme un Big Hell’s angel (ahah je l’imagine totalement comme ça !) mais sans moto
·         Les mangemorts se nommaient d’abord Cavaliers de Walpurgis
·         Les reliques de la mort est le premier tome à comporter des insultes
·         Sa sœur Dianne lui a dit « Si tu tues Hagrid, je ne te pardonnerai jamais »
·         La dernière phrase du dernier tome a longtemps été « Seuls ceux qu’il aimait pouvaient voir sa cicatrice » (phrase que je trouve par ailleurs bien plus jolie que celle qu’elle a fini par choisir).

J’ai donc été plutôt déçue par ce livre, car j’attendais plus de ses réflexions sur les grand thèmes que traite Rowling et qui font en partie le succès d’Harry Potter. Le livre réussit mieux dans la partie anecdotique, et nous apporte surtout une excellente nouvelle : Rowling a gardé toutes les notes qu’elle faisait quand elle écrivait les différents tomes, et envisage de rédiger une encyclopédie de l’univers potterien.

En bref 
Assez décevant par rapport aux promesses qu’il offrait en ce qui concerne la réflexion sur les thèmes d’Harry Potter et à cause du côté peu professionnel, ce livre est quand même intéressant quand il est plus anecdotique. Cependant, on peut peut-être trouver d’autres livres plus complets, ce qui fait que je doute que sa lecture soit indispensable pour les fans. Je vais tenter de trouver des livres du même genre en anglais, en espérant mieux tomber.