Taniguchi est le plus occidental des illustrateurs japonais :
son dessin, entre BD franco-belge et manga, a beaucoup de succès par chez nous –
moins au Japon, allez savoir pourquoi.
Dans Les années douces,
il met en image les mots d’Hiromi Kawakami dans son roman du même nom. L’histoire
est belle et simple : une femme de 37 ans rencontre un homme qui la
connait : il était son professeur, il y a de cela déjà plusieurs années.
Ils se retrouvent souvent dans le petit troquet où ils ont l’habitude de
manger. Petit à petit, ils s’assoient côte à côte, puis commencent à se voir en
dehors…
Si quelqu’un s’amusait à me demander pourquoi cet attrait
pour la littérature japonaise, l’un des éléments de réponse que je pourrais
donner serait sans doute ce gout indéfinissable que l’on ne retrouve que dans
les livres de ce pays. Ces histoires de personnes qui se croisent, se
recroisent et se reconnaissent, font un bout de chemin ensemble. Il y a une
langueur, voire une torpeur, mais qui est en même temps accompagnée d’une
grande douceur. On sent la vie qui s’écoule, lentement, et le temps que prennent
les personnages à la regarder passer sans rien pouvoir y faire.
Il ne se passe pas grand-chose dans cette histoire. Les
héros se retrouvent, puis ne se parlent pas parfois pendant des semaines. Ils
mangent, se taisent, vont au marché, en balade. On se pose des questions sur
leur relation surprenante : pourquoi passent-ils autant de temps ensemble ?
Comme se demande d’ailleurs Tsukiko, pourquoi, alors qu’elle a un rendez-vous
avec un homme, pense-t-elle à son vieux maitre ? « Il n’aurait pas
fait cela, lui ». Est-ce un attachement comme à un vieil ami, ou même de l’amour ?
Et puis il y a la nourriture, au cœur de cette histoire. On
y découvre la gastronomie nippone dans toute sa richesse, loin des clichés
sushi-maki que l’on connait par chez nous. Taniguchi est un grand gourmet (il a
d’ailleurs nommé l’une de ses œuvres Le
gourmet solitaire) et c’est un bonheur de le voir célébrer la nourriture
dans sa simplicité, son originalité et sa richesse. On prend plaisir à voir
Tsukiko manger avec grand appétit.
En somme, si vous aimez la littérature japonaise ou la
culture japonaise, lisez-le. Mais il est possible que certaines personnes
trouvent que tout cela manque un peu d’action… Moi j’aime ce genre d’œuvres qui
permettent de souffler, un bon coup et de se sentir mieux.